– Mardi 23 mai 2023
Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste
Brice Gaillard, secrétaire national au Budget, à la Planification écologique
et aux Nouveaux indicateurs de richesse
Nathalie Sarrabezolles, secrétaire nationale à l’Environnement et aux Biens communs
Bertrand Cavalerie, secrétaire national adjoint aux Biens communs
Le Gouvernement cherche depuis 48 heures à faire oublier l’échec de sa politique en matière de lutte contre le réchauffement climatique en multipliant les opérations de communication sans aucun contenu tangible.
Le Parti socialiste soutient toute démarche visant à réduire les gaz à effet de serre et à assurer la neutralité carbone et la soutenabilité de nos modes de production. Nous n’avons plus le luxe de tergiverser : la décarbonation n’est pas une option, mais une obligation. Cet enjeu est à la fois environnemental et social, car il faudra accompagner les populations les plus fragiles, celles qui souffrent le plus du dérèglement climatique. Sur ce point, rien de nouveau n’a été annoncé. Nous avons besoin d’une stratégie nationale d’adaptation claire, mais aussi de mener de pair une politique d’atténuation ambitieuse et de rompre avec un modèle de développement à bout de souffle. Encore faut-il s’en donner les moyens.
Le Gouvernement a d’abord présenté une « consultation » publique sur l’hypothèse jugée « pessimiste » d’un réchauffement climatique de + 4°C en 2100 et sur ses conséquences. En réalité, il ne s’agit que d’un sondage en ligne, basé sur un scénario connu et médian. De plus, l’intérêt des politiques d’adaptation n’est pas de travailler sur une moyenne annuelle comme le fait le gouvernement, mais sur les pics estivaux, quand le mercure pourrait grimper à + 5,1°c. Si le format et les scénarios interpellent, l’intention politique, elle, ne fait aucun doute. Encore une fois le Gouvernement se lance dans une opération de « greenwashing » pour faire oublier que le président de la République s’est dédit en ne suivant pas les recommandations de la Convention nationale pour le climat ; la France ne respecte toujours pas ses engagements climatiques ; le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) n’est toujours pas présenté alors que le précédent est arrivé à échéance en 2022.
C’est dès lors ce que nous attendions de la présentation par Elisabeth Borne du plan du Gouvernement visant à la réduction des gaz à effet de serre et du rapport remis le même jour par l’économiste Jean Pisani-Ferry et l’inspectrice générale des finances Selma Mahfouz, intitulé « les incidences économiques de l’action pour le climat ». Or, c’est encore l’histoire d’un rendez-vous manqué. Les annonces du gouvernement ne sont pas le signe d’un quelconque engagement de sa part mais la seule traduction du plan européen « Fit for 55 ».
De plus, un élément supplémentaire inquiète particulièrement dans ce cadre : le projet de loi « industrie verte », présenté il y a quelques jours, fait le choix assumé de n’incorporer aucun financement public pour la transition environnementale mais se limite à créer des dispositifs de mobilisation de l’épargne des particuliers, ce qui ne se fera qu’au détriment d’autres formes d’épargne : on peut en particulier penser au logement social, une nouvelle fois oublié par ce Gouvernement.
Dans ce contexte, nous déplorons qu’à nouveau, la communication gouvernementale soit en décalage avec toute ambition politique réelle. Les annonces formulées se bornent à annoncer un niveau de réduction des gaz à effet de serre à échéance 2030, tout en assortissant ce chiffre de sous-objectif par secteur. L’État, condamné il y a déjà deux ans pour inaction climatique, n’a pas pris réellement la mesure de l’urgence à agir. Aucune mesure forte n’est annoncée, aucun financement public n’est détaillé.
Pourtant, de nombreuses propositions sont dans le débat public et le Parti socialiste en a déjà avancé de nombreuses : conditionner les aides publiques au respect de critères sociaux et environnementaux, inscrire dans la constitution la règle verte, engager la planification écologique en lien avec les collectivités et les acteurs associatifs, créer un défenseur des biens communs, une prime climat pour financer la rénovation thermique des logements... Nous n’avons plus de temps à perdre dans des clics, des sondages ou des « plans » sans moyens : seules comptent les actions engagées et financées.
La proposition phare de l’ancien conseiller économique du président de la République, qui plaide désormais pour un prélèvement sur les ménages les plus aisés, reprend ainsi sans le dire l’idée d’une taxation sur le grand capital pour financer la transition écologique, d’un ISF climatique que nous portons depuis des années. Cette proposition a toujours été rejetée par Emmanuel Macron et ses gouvernements pour des raisons purement idéologiques, malgré l’avis de plus en plus unanime des économistes, même proches du Gouvernement. Jean Pisani-Ferry prône un «accroissement des prélèvements obligatoires» pour financer la transition environnementale, estimant dans son rapport que « le supplément de dépenses publiques induit par la transition climatique devrait être à l’horizon 2030 compris entre 25 et 34 milliards d’euros par an » : il met ainsi le gouvernement face à ses responsabilités et à son inaction.
En définitive, à défaut d’un plan d’action et/ou de financement, le Gouvernement fait ce qu’il sait faire de mieux : un plan de communication qui n’aura que trop peu d’effets concrets.