Le référendum britannique est un choc : comment ce pays a-t-il pu voter contre ses intérêts ? Au-delà de la stupeur et de l'incompréhension, il nous faut identifier les défis qui, après le vote, émergent pour le Royaume-Uni et l’Union européenne.
Le premier enjeu est la crise profonde, sociale, politique et constitutionnelle, que traverse le Royaume-Uni, comme bon nombre de pays européens. Comme d'autres avant lui, ce vote exprime un choix du repli et de la fermeture. Partout en Europe, la crainte de l'ouverture est à l’œuvre, y compris en France. S’il est une leçon à retenir de ce vote britannique, c’est que l'Union européenne devient la victime expiatoire de cette profonde crise du politique. Or adhérer à l’idée européenne, c’est plus que jamais partager les valeurs d’une société ouverte et universaliste, respectueuse des histoires et identités différentes.
Le deuxième enjeu est l'avenir de la relation entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. Ici, il s'agira d'une négociation entre des intérêts britanniques et européens plus ou moins convergents. Mais une chose est sûre : les options pour le Royaume-Uni sont très limitées. Quel que soit le modèle choisi, le retour à une certaine souveraineté est incompatible avec des concessions européennes. Inversement, toute tentative de préserver certains éléments de l’acquis passera par un renoncement douloureux aux mensonges colportés pendant la campagne du référendum.
Le troisième enjeu est celui de l'avenir de l'Union européenne à 27. A l’approche du soixantième anniversaire du Traité de Rome en mars 2017, l’heure est venue, enfin et même dans des circonstances dramatiques, de porter le regard sur les soixante prochaines années. S'atteler aux défis du XXIème siècle, c'est donner à l'Union européenne le projet de réguler la mondialisation car seul le poids d’une Europe unie et renforcée dans ses moyens d’action peut réussir à en faire changer le cours.
Pour cela, l’Union Européenne doit répondre à quatre crises : la crise de gouvernance économique européenne et l'absence de contrôle du capitalisme financier mondial ; la crise des ressources naturelles et l’urgence de la transition énergétique ; la crise de la protection et de la gestion des frontières, qui met en exergue l’absence de politique migratoire commune ; et enfin, les menaces pour la sécurité intérieure, comme la menace terroriste mondiale, contre lesquelles les moyens nationaux sont structurellement insuffisants.
Si ce débat stratégique n'est pas mené au plus vite, ou s'il échoue, alors devront être envisagées de nouvelles formes d'intégration différenciée. Pour sauver l’essentiel, l’Europe aurait alors à réduire son périmètre, au moins temporairement, ceux qui le souhaitent participant à des coopérations renforcées pour gérer ensemble leur énergie, leurs frontières et donc l’immigration, et leur sécurité intérieure.
C’est à ces arbitrages existentiels que doivent désormais procéder les dirigeants européens. Et c’est à y prendre part activement, courageusement, que devra s’atteler le prochain président de la République française. C'est donc de candidats profondément ambitieux et réformateurs pour la France et pour l'Europe dont la campagne présidentielle de 2017 aura besoin. Se présenter au suffrage des électeurs en laissant croire que les enjeux d'avenir pour la France et l’Europe sont différents relèverait de la même supercherie dramatique que celle qui a mené au Brexit.
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