La notion d’État-providence connaît un destin paradoxal dans la pensée politique française. Chacun se plaît à souligner les ambiguïtés du terme, mais chacun se trouve dans l’obligation d’y recourir pour rendre compte des fonctions de solidarité de l’État. Ainsi, le 9 juillet 2018, devant les parlementaires réunis en Congrès, Emmanuel Macron, chef de l’État, déclare vouloir « construire l’État-providence du XXIe siècle ». Dans cette perspective, l’expression « État-providence » est en quelque sorte l’équivalent de la notion anglo-saxonne de « Welfare State » et c’est ainsi qu’elle est le plus souvent entendue dans le langage public. Toutefois, utiliser le terme État-providence comme un équivalent de « Welfare state » ne va pas sans poser de problèmes de terminologie. En effet, dans l’histoire traditionnelle des idées politiques en France, la notion d’État-providence est une expression péjorative, inventée par les libéraux au cours du Second Empire pour dénoncer un État omnipotent inhibant le développement des initiatives individuelles et collectives et se substituant de manière illégitime aux solidarités traditionnelles. Traditionnellement, depuis le fameux discours d’Émile Ollivier à la Chambre (27 avril 1864), la responsabilité de cette émergence est à mettre au compte de la loi Le Chapelier (1791) interdisant les corporations et ne laissant aucune place entre l’individu et l’État. Tout au long de la IIIe République, c’est ce sens négatif qui s’impose et qui perdure [1].
CHOMAGE
Observatoire des inégalités - Chômage : les jeunes toujours aux premières loges
Entre 1975 et 2018, le taux de chômage a été multiplié par quatre pour les 20-24 ans et par presque autant pour les 25-49 ans. Aujourd’hui, malgré quelques signes de reprise de l’emploi, les jeunes actifs ont deux fois plus de risque d’être au chômage que leurs aînés.
En 2018, un jeune actif sur cinq (19,5 %) âgé de 20 à 24 ans est sans emploi. C’est quatre fois plus qu’il y a quarante ans. La majeure partie de l’augmentation du chômage des jeunes a eu lieu en dix ans, entre 1975 et 1985 : le taux passe alors de 5,3 % à 17,3 %. Les actifs de 25 à 49 ans sont beaucoup moins touchés. Leur taux de chômage est 2,3 fois moins élevé que celui des 20-24 ans. Celui des 50-64 ans reste le plus faible, même s’il a triplé (de 2,2 % à 6,6 %) depuis 1975. Si le taux est plus faible, à cet âge, la durée du chômage est très supérieure à celle des plus jeunes [1].
Observatoire des inégalités - 40 % des chômeurs touchent moins de 500 euros par mois
Un tiers des chômeurs ne touchent rien. En ajoutant ceux qui touchent une faible indemnité, 40 % ne reçoivent pas plus de 500 euros par mois et les deux tiers moins que le Smic.
30 % des chômeurs ne touchent ni indemnité chômage, ni le minimum social pour les chômeurs en fin de droit, l’allocation spécifique de solidarité [1]. Si l’on ajoute les 12 % qui touchent une indemnité inférieure à 500 euros, plus de 40 % des chômeurs reçoivent au plus 500 euros par mois. Ils ont donc moins de 20 euros par jour pour vivre. Les deux tiers ont moins que le Smic. Seuls 5 % empochent plus de 2 000 euros. Le régime d’indemnisation des demandeurs d’emploi est accusé d’être trop généreux, d’inciter les chômeurs à rester chez eux. C’est faux.
POPULISMES
Non Fiction Comprendre le(s) populisme(s)
Les populismes en France, en Italie et en Europe centrale et orientale ont-ils les mêmes origines et présentent-ils les mêmes symptômes ? Trois perspectives complémentaires.
Le terme de populisme, dont la science politique ne propose pas une acception très unanime, fait aujourd'hui florès, à la fois pour caractériser des mouvements politiques de droite, de gauche et « anti-système ». La contestation des institutions politiques et des clivages classiques, les bouleversements économiques et sociaux, les phénomènes identitaires résultant d'une crise des repères culturels, ainsi que la mise en cause des élites et des médias traditionnels... tous ces phénomènes connus de l'actuel désenchantement démocratique concourent à une très importante crise de gouvernabilité touchant des pays de différents continents, avec des causes et des conséquences souvent différentes d'un cas à l'autre. Or, dégager de ce magma encore brûlant une nature composite « du » populisme semble relever de la gageure.
MINIMA SOCIAUX
Observatoire des inégalités - Minima sociaux : qui touche combien ?
Quatre millions de ménages reçoivent un minimum social. On connaît le RSA, mais il en existe plusieurs autres. Qui touche combien ?
Quatre millions de ménages [1] reçoivent un minimum social en France (données fin 2017). En comptant les conjoints et les enfants, sept millions de personnes sont ainsi couvertes. Au total, il existe une dizaine de prestations, qui répondent à des situations différentes, avec des montants inégaux. Ces minima sont destinés à éviter à ceux qui les touchent de vivre dans la misère totale. Bien sûr, celle-ci existe encore en France, mais sans ce « filet de sécurité », elle serait bien plus grande.
PRIMAIRES US
Le Vent se lève - L’establishment démocrate panique face au succès d’Elizabeth Warren et de Bernie Sanders
La présidence de Donald Trump n’a jamais été aussi proche de s’effondrer, tandis que la gauche mobilise et élargit la base militante du Parti démocrate dans des proportions record. Pourtant, loin de s’en féliciter, les élites du parti sont en proie à une panique générale. Par Politicoboy.
Donald Trump apparaît plus fragile que jamais, empêtré dans une procédure de destitution qui accable son administration et plombe son taux de popularité, alors que le fiasco du retrait des troupes américaines au nord de la Syrie a fracturé sa propre majorité au Congrès. Signe de la fébrilité du président, Donald Trump a renoncé à son projet d’organisation du prochain G7 dans son propre complexe de Floride, et caresserait même l’idée de vendre son hôtel de Washington, où les Saoudiens louent souvent des centaines de chambres vides pour verser au président des pots-de-vin déguisés.
BREXIT
Fondation Jean Jaurès - Brexit : casse-tête et casse-pipe, Jean-Philippe Derosier
Le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’université de Lille, auteur du blog La Constitution décodée, livre, dans sa cinquième contribution d’une série réalisée en partenariat avec L’Hétairie, son analyse des derniers rebondissements du Brexit.
Le Brexit n’en finit pas de finir. Et de repartir.
We have a deal : un temps, l’accord est conclu. Puis, l’instant d’après, il est rejeté, laissant alors planer la menace du no deal, scénario que tous redoutent, à l’exception des Britanniques les plus europhobes, tel Nigel Farage. Les négociations se poursuivent pour aboutir à un nouvel accord, modifié, adapté, approprié… et rejeté, à nouveau.
Tel est le feuilleton de ces dernières années, digne des plus mauvais soaps car systématiquement construits selon un canevas identique, qui ne surprend jamais.
Le régime parlementaire britannique, référence en la matière et exemple de stabilité, en souffre
LAICITE
L'Aurore - Voir au-delà du voile, Gilles Clavreul
Quelle mouche l’a donc piqué ? En déplacement à La Réunion – un déplacement tourné vers les sujets économiques et sociaux – Emmanuel Macron est longuement revenu, une fois encore, sur l’énième polémique sur le voile, déclenchée par la lamentable interpellation d’un élu d’extrême-droite à l’encontre d’une femme voilée assistant à une session du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.
Une majorité de plus en plus agitée
Retour en arrière : le discours très ferme prononcé après l’attentat de la préfecture de police, appelant à lutter sans faiblesse contre « l’hydre islamiste », manifestait une netteté nouvelle, tardive mais bienvenue, pour dénoncer non pas seulement le terrorisme qui tue, mais aussi l’islamisme qui enflamme les consciences et conditionne les esprits. Puis survient la « polémique Odoul », et les choses se compliquent d’un coup : non pas sur la dénonciation du comportement de l’édile, là-dessus le consensus est presque général ; mais sur le statut des mères accompagnatrices et, plus largement, sur le regard porté sur le voile par les acteurs politiques. Mais voilà que s’opposent, de nouveau, au sein de la majorité, la ligne libérale et accommodante défendue notamment par le député Aurélien Taché, et une ligne républicaine et ferme incarnée par Jean-Michel Blanquer qui, tout en rappelant le droit existant – les mères accompagnatrices sont de simples usagers du service public, elles peuvent user de leur liberté d’expression du moment qu’elles ne font pas de prosélytisme - affirme que le voile n’est « pas souhaitable » dans notre société. A partir de là, et comme nous l’avons dit depuis longtemps, apparaissent deux macronismes irréconciliables ; au point que le Premier ministre tente, sans grand succès, de calmer le jeu, en réaffirmant la volonté du gouvernement de lutter avec la dernière énergie contre « le communautarisme », tout en excluant que la majorité rejoigne la proposition de loi des Républicains interdisant les signes religieux des mères accompagnatrices. Las, cela ne suffit pas, et la polémique s’envenime au point que le ministre de l’Education demande des sanctions disciplinaires contre Aurélien Taché.
PAYS DU GOLFE