Pourquoi l’Inde, comme ce fut le cas en Europe, en Chine ou au Japon, n’a-t-elle pas amorcé dès la fin du XVIIIe siècle une transition vers la société de propriétaires et l’estompement des inégalités de caste ? La présence coloniale britannique en a décidé autrement.
Dans Capital et idéologie, Thomas Piketty mobilise le cas de l’Inde pour étoffer deux des principales réflexions autour desquelles est construit son ouvrage. La première renvoie à l’affirmation que « chaque régime inégalitaire repose au fond sur une théorie de la justice » (p. 837). Piketty aborde ainsi la théorie de la justice dans sa version indienne en plaçant au cœur de son analyse l’institution de la caste (chapitre 8 : Sociétés ternaires et colonialisme : le cas de l’Inde). La seconde, plus ancrée dans le XXe et le XXIe siècles, pose la question des conditions rendant possible la formation de coalitions redistributives. Là encore, c’est la question de la caste qui est au centre de ses réflexions, que ce soit par une attention aux politiques de quotas en faveur des groupes de basses castes (réservations) qui ont été le produit de ces coalitions égalitaires ou par une analyse du rôle de la caste dans les dynamiques électorales (chapitre 16 : Social-nativisme : le piège identitaire postcolonial).
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