– Jeudi 5 octobre 2023
Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste
Iñaki Echaniz, secrétaire national au Logement et à la Qualité de l’habitat
C’est dans un contexte de crise du logement inédite depuis la seconde guerre mondiale, que s’est tenu le Congrès HLM cette semaine à Nantes. Rarement les professionnels du secteur, de l’Union sociale pour l’habitat (USH) à la FNAIM, les élus locaux et les associations n’auront été aussi unanimes : l’heure est grave et il y urgence pour le gouvernement à réagir.
Les voyants de la construction sont au rouge. Le nombre de constructions neuves autorisé a chuté de 23 % sur un an, pour s’établir à moins de 400 000 logements, quand on estime à plus d’1/2 million par an le besoin de nouveaux logements dans notre pays. Parmi eux, 85 000 logements sociaux seulement ont été autorisés en 2023, quand il en faudrait près de 200 000 selon l’USH ; et la baisse devrait inexorablement se poursuivre selon une étude de la Banque des territoires, entre nécessaire rénovation du patrimoine existant et dette grandissante des bailleurs.
Il y a surtout la réalité sociale, massive et violente, que vivent de plus en plus de Français. 15 millions souffrent du mal logement. 2,5 millions sont en attente d’un logement social et les délais s’allongent, jusqu’à 8 ans parfois. La hausse continue du taux d’effort des ménages, atteignant 1/3 du revenu dans les secteurs en tension et même jusqu’à 50 % dans le parc privé, participe d’une précarisation grandissante des Français, qui se traduit concrètement dans la hausse des impayés de loyers ou encore des plans d’apurement à la Banque de France.
Emmanuel Macron a fait du secteur du logement le principal contributeur aux économies de l’État dès son entrée en fonction. L’effort pour le logement n’a jamais été aussi bas (1,4 % du PIB). L’annonce du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires en ouverture du Congrès HLM, d’une décentralisation des politiques de logement, si elle peut être une réponse à la crise et à un pilotage au plus près des besoins de nos concitoyens, ne peut pas être le moyen, pour le Gouvernement, de se débarrasser d’un fardeau. Le transfert de compétences aux collectivités territoriales devra nécessairement être accompagné d’un transfert pérenne de moyens.
Alors que le logement est le premier poste de dépenses des ménages, depuis 2017, une succession de mesures a largement entamé le pouvoir d’achat des plus modestes : réforme du mode de calcul et baisse du montant des APL dont le niveau est équivalent à celui de 2017 sans tenir compte de l’inflation ; suppression de l’APL accession; inadaptation et insuffisance des mesures de rénovation énergétique…
D’autres mesures comme la hausse de la TVA sur la construction de logements sociaux ont fragilisé le secteur, en obérant dangereusement les capacités de production de logements sociaux, tout comme celles d’entretien du patrimoine des bailleurs. Avec la réduction du loyer de solidarité (RLS) mise en œuvre dans la loi de finances pour 2018, le Gouvernement a fait porter l’essentiel de l’effort d’économie des APL sur les bailleurs sociaux, les privant ainsi de 6 milliards d’euros entre 2018 et 2022. C’est un véritable impôt sur les HLM qu’Emmanuel Macron a levé.
La crise de la production est amplifiée par une réduction de l’offre locative classique au profit des meublés de tourisme. Le nombre de logements proposés sur les plateformes comme Airbnb a explosé ces dix dernières années pour dépasser, dans certaines grandes villes, celui des biens mis en location classique. Cette situation trouve son origine dans un régime fiscal avantageux qu’il est urgent de réformer.
Face à la crise, il est essentiel de construire plus et mieux, de rénover et de réguler le marché, par l’encadrement des loyers, celui des prix du foncier ou en renforçant la loi SRU. Dans le cadre du PLF 2024, les socialistes formuleront des propositions fiscales pour le logement : outils et moyens pour nos maires, mesures de soutien aux bailleurs sociaux, propositions en faveur de la rénovation, de la production écologique et de l’habitat permanent.
Le Parti socialiste défend plus globalement la mise en place d’un bouclier logement, une nouvelle protection sociale qui permette de limiter à 25 % la part du logement (loyer chargé) dans le revenu des ménages. Toute la stratégie de la politique du logement doit être orientée vers cet objectif : permettre aux Français de vivre dignement.