Ce que les révisions à la baisse des différentes prévisions (FMI, OCDE, OFCE) présentées en ce début d’automne 2015 nous disent sur la zone euro n’est pas très réconfortant. Une reprise est en cours, mais elle est à la fois poussive et fragile (voir : « Une reprise si fragile »). Or le taux de chômage de la zone euro est encore très élevé (presque 11 % de la population active au deuxième trimestre) et une reprise poussive signifie une baisse si lente (0,6 point par an) qu’il faudra plus de 7 années pour revenir au niveau de 2007. Dans l’intervalle, la politique monétaire non-conventionnelle de la Banque centrale européenne peine à ré-ancrer les anticipations d’inflation. L’annonce du Quantitative Easing en début d’année 2015 avait fait remonter l’inflation à 5 ans dans 5 ans[1], mais depuis le mois de juillet 2015 le soufflé est à nouveau retombé et les anticipations à moyen terme sont de 0,8 % par an, en deçà de la cible de la BCE (2 % par an). L’inflation sous-jacente s’installe dans un territoire bas (0,9 % par an) et le risque est élevé que la zone euro se bloque dans une situation d’inflation basse ou de déflation, ressemblant étrangement à ce qu’a connu le Japon du milieu des années 1990 à aujourd’hui. Peu d’inflation n’est pas une bonne nouvelle parce qu’elle est enclenchée par un chômage élevé et des salaires nominaux encore moins dynamiques. Résultat, les salaires réels progressent moins vite que la productivité. Peu ou pas d’inflation, c’est à la fois des taux d’intérêt réels qui restent élevés, qui renchérissent les dettes et paralysent l’investissement, mais c’est aussi une politique monétaire non-conventionnelle qui bloque la capacité de valoriser les risques et qui perd peu à peu sa crédibilité à maintenir la stabilité des prix, à savoir tenir l’inflation dans la cible annoncée. Mario Draghi l’avait annoncé en août 2014 au symposium de Jackson Hole, face à un chômage persistant, la politique monétaire ne peut pas tout. Il faut des réformes structurelles (que peut dire d’autre un banquier central ?) mais il faut aussi une politique de demande. Ne pas le faire c’est courir le risque de la stagnation séculaire, formulée par Hansen à la fin des années 1930 et remise au goût du jour très récemment par Larry Summers.
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