Le Grand Continent - L’émergence du paradigme productiviste, une conversation avec Dani Rodrik
Pour l’économiste de Harvard, l’ère de l’hypermondialisation se dissipe : les impératifs de sécurité nationale ont déjà commencé à dicter les nouvelles règles économiques mondiales. Croyant poursuivre les mêmes buts, nous cultivons des lignes de confrontation — celle ouverte entre Bruxelles et Washington ces jours-ci le montre. Comment éviter que le nouveau paradigme ne soit pire que l’ancien ?
Depuis la pandémie de Covid-19, de nombreux experts, universitaires et politiciens annoncent le déclin du néolibéralisme et de la mondialisation. Selon vous, quelles sont les causes de ce changement dans les perceptions ?
Le discours sur ce que j’ai appelé l’hypermondialisation s’est réellement dissipé. C’est particulièrement visible depuis la pandémie et, plus encore, après la guerre en Ukraine, avec ses ramifications géopolitiques, et avec le renforcement de la compétition avec la Chine. Mais ces causes immédiates et très visibles doivent être resituées dans leur contexte, celui d’une décennie qui voyait déjà devenir très évidents les faiblesses et les problèmes associés au néolibéralisme et à l’hypermondialisation.
Vincent Jarousseau est l’auteur de l’ouvrage Les femmes du lien, un roman-photo documentaire consacré aux travailleuses du soin : Valérie, technicienne d’intervention sociale et familiale (TISF), Marie-Basile, aide à domicile ou encore Marie-Claude, aide-soignante. Ces métiers, que la crise sanitaire a permis de rendre plus visibles, restent cependant mal connus, souvent dévalorisés et trop peu soutenus par les responsables politiques. Pourtant, comme le montre Vincent Jarousseau, ces femmes du lien sont au coeur des enjeux sociaux, sanitaires et écologiques auxquels nos sociétés contemporaines sont confrontées. Un livre hommage, qui retrace plusieurs récits de vie et nous invite à actualiser nos imaginaires collectifs.
Observatoire des inégalités - La France de ceux qui n’ont rien
Point de vue 6 décembre 2022
Le Rapport sur la pauvreté en France, édition 2022-2023, vient de paraitre. Il dresse un état des lieux complet et consacre un dossier à la grande pauvreté. Anne Brunner et Louis Maurin, les auteurs de cette publication, vous en présentent les intentions.
Le Rapport sur la pauvreté en France, édition 2022-2023, vient de paraitre. Ce document a pu être publié car plus de 750 personnes l’ont soutenu lors de notre opération de financement participatif, et grâce au soutien de nos partenaires, Apivia Macif Mutuelle, le bureau d’études Compas et la Fondation Abbé Pierre. À l’heure où le débat public est constitué de tweets et de punchlines, où des responsables politiques montrent du doigt, sans honte, les prétendus « assistés », nombreux sont celles et ceux qui demeurent convaincus que pour combattre la pauvreté, nous avons plutôt besoin de politiques publiques à la hauteur. Et, en préalable indispensable, de bien mesurer le phénomène.
Le Vent se lève - Une guerre de géants pour quelques nanomètres
Une guerre mondiale a été déclarée le 7 octobre dernier. Si aucune chaîne d’information n’a couvert l’événement, nous aurons tous à souffrir de ses conséquences. Ce jour-là, l’administration Biden a lancé une offensive technologique contre la Chine, en imposant des limites plus strictes et des contrôles plus durs sur l’exportation non seulement des micro-processeurs, mais aussi de leurs schémas, des machines utilisées pour graver les circuits sur silicone et des outils que ces machines produisent. Désormais, si une usine chinoise a besoin de n’importe lequel de ces composants pour produire des marchandises, les entreprises doivent demander un permis spécial pour les importer. Pourquoi les USA ont-ils mis en place ces sanctions ? Et pourquoi sont-elles si dures ? Article du journaliste Marco D’Eramo, publié dans la New Left Review et traduit par Marc Lerenard pour LVSL.
Observatoire des inégalités - Riches et pauvres, inégaux dans la capacité à polluer
Données 22 décembre 2022
Les 10 % des ménages les plus riches ont une empreinte carbone de 40 tonnes de gaz à effet de serre en équivalent CO2 par an, tandis que les 10 % les plus pauvres en émettent 15 tonnes. Le mode de vie des plus riches contribue davantage au réchauffement climatique.
Les ménages situés parmi les 10 % les plus riches émettent 40 tonnes d’équivalent CO2 par ménage et par an en moyenne en France, contre 15 tonnes pour les 10 % les plus pauvres selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) [1]. Le mode de vie des plus aisés produit 2,7 fois plus de gaz à effet de serre [2] dans l’atmosphère que celui des plus défavorisés et contribue donc beaucoup plus au réchauffement de la planète.
Les transports, le logement et le chauffage sont les principales causes d’émissions de gaz à effet de serre. Ce sont d’abord des émissions directes : du dioxyde de carbone est notamment émis dans l’atmosphère chaque fois que de l’essence est brulée par un moteur de voiture, ou bien du gaz ou du bois dans une chaudière, par exemple. La construction des logements met également en jeu de grandes quantités d’énergies fossiles, pour le transport des matériaux, par exemple. Plus on est riche, plus on dispose d’un logement spacieux, qu’il a fallu construire et qu’il faut chauffer. On se déplace davantage en voiture et on prend plus souvent l’avion aussi.
Depuis plusieurs années, le baromètre Procivis/Harris Interactive permet d’éclairer le rapport des Français à leur logement : choix de l’habitat individuel vs. collectif, perception de la pénurie et de la montée des prix… Avec, pour cette édition, un focus sur la problématique de la rénovation énergétique, un sujet clé face à l’urgence climatique et à la crise de l’énergie.
Comme les années précédentes, le baromètre Procivis/Harris Interactive 2022 est riche d’enseignements que nous partageons avec la Fondation Jean-Jaurès. Nous conservons la même exigence méthodologique : une enquête auprès de 10 000 Français, échantillon considérable qui ouvre de nombreuses possibilités d’analyse. Plusieurs questions sont récurrentes d’une année sur l’autre pour permettre une lecture longitudinale des comportements et représentations liés au logement. Et certaines autres varient de telle sorte à éclairer un point particulier de l’actualité. Nous avions, l’an dernier, fait un focus sur les attentes des Français en termes de politiques publiques du logement, à quelques mois de l’élection présidentielle et donné un contenu à la notion de « parcours » d’habitation, souvent employée dans le secteur du logement. Nous avions notamment pu révéler la « quête de logement » qui semble guider les Français dans leurs déménagements successifs.
INTERVIEW - Le Premier secrétaire du PS, qui remet en jeu sa position le 25 janvier prochain, est plutôt soutenu par la base des militants du PS, selon le politologue Rémi Lefebvre. Mais l'attelage qu'il a constitué avec Jean-Luc Mélenchon, dans le cadre de la Nupes, crispe sa famille politique.
Sauvera-t-il sa place ? Alors que le Congrès du Parti socialiste approche à grands pas, tous les yeux sont rivés sur Olivier Faure. Le Premier secrétaire du PS, principal artisan de l'accord de la "Nupes", est sujet aux critiques d'une partie de sa famille politique qui lui reproche son inféodation à Jean-Luc Mélenchon, dont les orientations sur l'Europe, l'économie de marché ou la laïcité fragilisent la culture de gouvernement des socialistes.
ENTRETIEN. Le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, est candidat à la direction du PS face à Olivier Faure pour réconcilier un parti proche de l’explosion.
Une troisième voie, ni pro-Nupes, ni anti. Le maire socialiste de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, se présente contre Olivier Faure pour lui succéder au poste de secrétaire national du PS à l'occasion du congrès de Marseille qui aura lieu fin janvier. Méconnu du grand public, cet ancien proche de Laurent Fabius a été président du conseil régional de Haute-Normandie en 2013. Tête de liste en 2015, il a perdu face à Hervé Morin lors des premières élections régionales de la Normandie réunifiée. Élu maire de Rouen et président de la métropole en 2020, ce scientifique de formation a fait partie de l'équipe des maires, qui a soutenu Anne Hidalgo lors de l'élection présidentielle.
Pour que la croissance réduise la pauvreté ces trente dernières années, il aurait fallu qu’elle bénéficie plus aux pauvres qu’au reste de la population, mais ce sont d’abord les riches qui en ont profité.
La France s’enrichit : entre 1996 et 2019, son produit intérieur brut (PIB) est passé de 1 600 milliards en 1996 à 2 332 en 2019, soit + 45 % (après élimination des hausses dues à l’inflation).
Ce qui a permis de créer près de 4 millions d’emplois : 23,6 millions de travailleurs en activité en 1996, 27,4 en 2019, 16 % de plus. Comme le PIB a progressé plus vite que l’emploi, cela signifie que la production moyenne par travailleur a augmenté.
Fondation Jean Jaurès - Montpellier, un air de vi(ll)e idéale ?
Montpellier a, sur le papier, toutes les qualités d’une ville idéale. Mais est-ce la perception de ceux qui y vivent ? Pour le mesurer, Frédéric Dabi, directeur général Opinion de l’Ifop, et Jérémie Peltier, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès, analysent les résultats de l’enquête « Le climat municipal à Montpellier ».
Rapport à la vie, rapport à la ville
La crise sanitaire a été un moment de grande réinterrogation sur nos temps de vie, notre travail et nos lieux d’habitation. Un certain nombre d’aspirations nouvelles sont apparues depuis : privilégier son cadre de vie à son travail, vivre près de la nature, pouvoir profiter de son temps libre. En d’autres termes, reprendre le temps de vivre pour soi et sa famille, en témoignent les volontés de déménagement et la forte demande d’épanouissement au travail constatés chez bon nombre de Françaises et de Français, notamment chez la jeune génération depuis un an maintenant1.
Le Vent se lève - Jacques Trentesaux : « L’information est un bien commun »
Jacques Trentesaux est rédacteur en chef de Mediacités, un média d’investigation à l’échelle locale, qui depuis sept ans propose articles et enquêtes dans quatre villes (Lille, Lyon, Nantes et Toulouse). Ce média résume son projet sous la forme d’un triptyque : enquêter, expliquer, participer. Il revient pour LVSL sur le rôle démocratique de l’indépendance de la presse dans un climat de défiance relative des citoyens à l’égard des médias et des élus.