Les mythes ont la vie dure. Celui d’un « tournant » libéral des États-Unis sous Ronald Reagan jouit assurément d’une fortune particulière. Influencé par les économistes Milton Friedman et Friedrich Hayek, le président républicain aurait supposément consacré toute son énergie à baisser les impôts et réduire le déficit budgétaire. L’examen détaillé de son bilan, en particulier de ses réformes fiscales, révèle pourtant l’exact inverse : c’est plutôt une forme particulière de keynésianisme qui a prévalu sous sa présidence – et même une politique industrielle cachée, centrée sur la hausse sans précédent du budget du Pentagone. Loin de signer le triomphe du laissez-faire, les deux mandats de Reagan ont consolidé un capitalisme monopolistique, déterminé moins par une quelconque doctrine que des intérêts stratégiques nationaux. De quoi relativiser les discours sur le « retour de l’État stratège » supposément initié par Joe Biden, dans le sillage de la crise Covid-19 et de l’invasion russe en Ukraine…
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