Avant, il était facile de ranger chaque chose, chaque personne, chaque situation, chaque mouvement social dans une case ; maintenant tout, dans le monde, s’hybride : les voitures, les objets, les cultures, les identités, les entreprises, les villes, les campagnes, les commerces, etc. Pour Gabrielle Halpern, docteur en philosophie, il est urgent d’apprivoiser l’hybride, au risque de voir « masse » et « identité » se rejoindre.
Avez-vous déjà entendu parler d’Elias Canetti, et de son ouvrage Masse et Puissance ? Il est l’un des plus grands penseurs européens du XXe siècle ; son œuvre mérite d’être lue et méditée, parce qu’elle n’a pas fini de nous offrir des grilles de lecture pour comprendre notre monde. L’homme redoute le contact de l’inconnu plus que tout au monde, écrit-il, et toutes les distances, tous les comportements qu’il adopte sont dictés par cette phobie du contact. Or, c’est dans la masse seulement que l’homme a l’impression qu’il peut être libéré de cette phobie du contact. Mais si soulagement il peut y avoir, c’est en vertu de ce que Canetti appelle « la décharge », qui correspond au moment où tous ceux qui font partie de la masse « se défont de leurs différences et se sentent égaux »[1]. L’égalité semble régner au sein de la masse ; c’est pour cela qu’elle est irrésistible.
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