La guerre en Ukraine, la formulation de menaces nucléaires et le référentiel toujours présent de la crise de Cuba dans les discours publics et analyses d’experts mettent le projecteur sur les réponses dissuasives des démocraties occidentales et en particulier de la France. Pour celle-ci, il est souvent mis en avant un « consensus » à propos de la dissuasion nucléaire depuis les années 1980. L’analyse de l’historien Yannick Pincé montre cependant que ce consensus est au mieux fragile, si ce n’est fictif.
C’est sous la plume de Charles Hernu, alors président de la commission de la défense nationale du Parti socialiste, qu’apparaît en juillet 1973 la notion de « consensus » sur la politique de défense. Tout autant le contexte que le contenu de la remarque sont alors audacieux. En effet, le futur ministre de la Défense réagit à une critique de la part d’officiers de la Marine nationale contre une expédition, à laquelle participent des personnalités politiques de gauche et du centre, des militants pacifistes et des religieux, qui vise à empêcher la campagne d’été d’essais nucléaires en Polynésie. Cet événement est nourri du contexte plus général des années 1970, période où le militantisme post-1968 porte l’antimilitarisme de la jeunesse de gauche. Pourtant, Hernu estime qu’« il n’y a pas de défense efficace quelle qu’elle soit, sans consensus populaire1 ».
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